Handicap 2008 : des actions tous azimuts sur fond de crise

Publié le par octapeh

Le handicap, ça n'arrive qu'aux autres ? Certainement pas : il survient bien souvent en cours de vie, nous explique Najiba Fradin, Directrice adjointe de l'Agefiph* qui décrit en exclusivité pour Jobetic la campagne massive que mène l'association auprès des "27 000 entreprises qui n'ont entrepris aucune action".
Cette année, la semaine Handicap est marquée par d'innombrables actions et entreprises impliquées. Pourtant, la crise menace la population handicapée au premier chef. Et l'Etat envisage de ponctionner 50 millions d'euros sur le budget formation des handicapés !

Jamais la Semaine pour l'Emploi des Personnes Handicapées, créée il y a 12 ans par l'Adapt, n'a déclenché une telle marée d'annonces et d'actions. Collectives ou spécifiques à une entreprise ou organisation, les actions en faveur de l'emploi des handicapés dénotent une effervescence inhabituelle.

Première raison indubitable : la loi de 2005 (voir notre dossier 2007 commence à produire ses effets : les "contributions" que devront verser les entreprises réfractaires seront de plus en plus élevées, surtout à partir de 2010 (1500 fois le smic horaire).

Deuxième raison, un peu moins visible, la montée au créneau de l'employeur public, qui jusque là "était assujetti à l'obligation d'emploi mais pas à la contribution. Depuis la loi de 2005, il doit désormais contribuer au fonds public qu'est le FIPHP", explique Najiba Fradin, Directrice adjointe de l'Agefiph, organisme chargé de collecter et gérer ces fameux fonds de "contribution".

Bonne nouvelle enfin, mais qui reste à confirmer : les premiers éléments d'enquête de l'Agefiph à mi-2008 sembleraient indiquer que les employeurs se sentent davantage concernés par le sujet. Une tendance d'autant plus intéressante que les réticences ne manquent pas, tant à la tête des organisations qu'à leur base : outre le fait que leur poste de travail doit souvent être aménagé, l'intégration des personnes handicapées se heurte aux résistances nombreuses des collègues et managers au sein des équipes.

Tout irait bien donc, si la crise n'avait pas pointé son nez. Les demandeurs d'emploi handicapés en pâtissent en premier lieu. Car ils souffrent toujours et encore de l'inadéquation de leurs profils aux besoins des entreprises. Pour couronner le tout, l'Etat a annoncé récemment son intention de ponctionner 50 millions d'euros ... sur le budget formation de l'Agefiph.

Une ponction qui s'avèrerait d'autant plus pénalisante que la formation constitue plus que jamais le maître mot de l'intégration des personnes handicapées sur le marché de l'emploi. Est-ce à dire que Handicap rime avec mauvaise formation ? Oui et non. Oui, car les personnes handicapées à la naissance ou en début de vie n'ont pas bénéficié des régimes scolaires communs. Une ségrégation enfin corrigée par la loi de 2005.

Mais aussi, le constat est plus complexe à énoncer, parce que les personnes frappées par la maladie et l'accident en cours de vie sont celles qui sont les moins bien protégées. Employés et ouvriers, hommes et femmes, dotés de faibles moyens, sont moins bien soignés, roulent dans des véhicules plus dangereux ... et sont donc plus sensibles aux aléas de la vie.

Aléas qui, rappelons-le, peuvent indifféremment toucher chacun d'entre nous !


Adapt : Association pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées
FIPHFP : Fonds pour l'Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique
Agefiph : Association de Gestion du Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées
L’Agefiph collecte les contributions financières des entreprises de 20 salariés et plus qui s’acquittent par ce moyen, en tout ou partie, de leur obligation d’employer des travailleurs handicapés. Les sommes ainsi collectées sont utilisées pour favoriser toutes les formes d’insertion professionnelle des travailleurs handicapés en milieu ordinaire de travail.
Handicap 2008 : des actions tous azimuts sur fond de crise

Najiba Fradin, directrice adjointe de l'Agefiph : « Nous allons suivre de près 27 000 entreprises »
L’année 2008 est on ne peut plus contrastée pour l’organisme qui gère les quelques 460 millions d'euros provenant essentiellement des "contributions" des entreprises ne respectant pas la loi sur l’emploi des handicapés. D'un côté, cet été, le gouvernement a annoncé une « ponction » de 50 millions d’Euros sur son budget, tandis que de l'autre, l’Agefiph a entrepris une vaste campagne d’incitation auprès de chacune des 27 000 entreprises de plus de 20 salariés qui n’a recruté aucune personne handicapée. Un énorme chantier que l’Agefiph compte terminer fin 2010. Les explications de Najiba Fradin, la directrice adjointe de l’Agefiph.

Comment allez-vous procéder pour convaincre 27 000 entreprises ?
C'est en effet un chantier énorme. Nous avons d’abord mis au point un cahier des charges qui permet de définir précisément la méthodologie des actions que nous avons confiées à des sous-traitants. Pour ce faire, nous avons agréé 109 intervenants sur l'ensemble du territoire. Leur mission consiste à toucher 10 à 13 000 établissements sur l’année 2008 et le reste jusqu'à fin 2010. Ces intervenants procèdent en premier lieu à un diagnostic simple. Ensuite, il leur faut accompagner chaque entreprise pour qu'elle réalise au moins une action positive. C'est-à-dire soit un recrutement de personne handicapée. Soit une prestation d'achat ou de service avec les établissements de travail protégé.

Quel est le coût pour ces entreprises ?
Notre prestation est gratuite pour toutes celles qui acceptent nos préconisations. Nous leur proposons l’ensemble des outils disponibles en les aidant à identifier une action positive. Mais aussi, nous les informons sur les risques et le coût des pénalités si elles ne font rien.

Y a-t-il un portrait robot du « mauvais élève » en matière d’emploi pour les handicapés ?
Difficile de les montrer du doigt car 80% des 27 000 établissements n'ont pas de DRH, donc ne disposent pas d'un cadre capable de s'investir pleinement. Parmi les secteurs les plus concernés, on trouve le commerce, la réparation automobile, l’immobilier, les services aux entreprises...

Où en est-on aujourd’hui ?
A ce jour, les choses se passent à peu près bien. Nous allons bientôt dresser un bilan et j'ai déjà des éléments intermédiaires qui me permettent de penser que les mentalités évoluent. Les intentions sont là, contrairement au discours précédent qui se résumait à : "On préfère payer". Le diagnostic sur les premiers milliers d’entreprises concernées est pour l'instant de 2 à 3 préconisations d’action positive par établissement. La préconisation n'est pas une idée théorique, mais une démarche concrète.

Il est vrai aussi que certaines de ces entreprises sont assujetties depuis très peu de temps à la loi sur le handicap. Elles se posent la question pour la première fois. D'autres ont déjà eu une expérience, avec un salarié handicapé, mais elles ne peuvent pas recruter car elles sont en bute à des difficultés économiques... Les plus petites entreprises découvrent un certain nombre de possibilités en conformité avec la loi : sous-traitance, accueil de contrats en alternance ...

D’où un aspect largement psychologique ?
Notre démarche, c’est aussi la prévention devant les réticences et les craintes partagées par tous les acteurs, y compris par les personnes handicapées elles-mêmes. Nombre de personnes handicapées ont en effet très peur de se mettre en situation d'échec, peur de la représentation d'elles-mêmes, d'où les actions de préparation à l'emploi.

Le phénomène est similaire dans les organismes de formation ou à l’école : dans notre société, le handicap n’évolue au grand jour que depuis peu. Nos fils et nos filles ne fréquentent peut-être pas beaucoup de jeunes handicapés, mais demain, les enfants auront d'autres réflexes, grâce aux dispositions de la loi de 2005.

Qu’en est-il pour les grandes entreprises ?
Pour les grandes entreprises, les problématiques sont différentes : elles lancent de grandes opérations de communication sur la diversité, sur l'application de la loi, mais aussi des opérations de communication interne : dialogue à tous les échelons, besoin de mobiliser les salariés sur le sujet, mission des grandes entreprises qui sont des leaders d'opinion, communication intéressée.

S’agit-il vraiment d’action, ou de recherche d’image ?
Dans les grandes entreprises, je rencontre beaucoup de responsables et de DRH : force est de constater que leur démarche est assez sincère sur le sujet. Ces sociétés comptent beaucoup de personnes qui ont contracté des handicaps dans le cadre de leur travail. Elles sont tout à fait en position de responsabilité.

Il est vrai aussi que les entreprises de cette taille recrutent des profils qu'on ne trouve pas chez les handicapés. Il faut donc tenir compte de l'adéquation entre offre et demande. Communiquer pour une grande entreprise, c'est aussi « faire savoir », afin d’obtenir des candidatures. Car le premier problème pour une personne handicapée est le niveau de qualification.

La crise financière et économique actuelle a-t-elle des répercussions sur l'emploi des chercheurs d'emploi handicapés ?
On constate les mêmes mécanismes que lors des décroissances d'emploi précédentes : le ralentissement touche très vite les personnes handicapées. Et quand la reprise revient, il faut plus de temps pour reprendre le rythme. Nous réfléchissons à des mesures ou à des dispositions pour traverser cette période. Il faut en particulier relancer les mesures en faveur des seniors, aider les Cap emploi, lancer des actions de formation supplémentaires, proposer des actions de formation une fois que le contrat de travail est signé...

Quels sont les programmes de formation les plus suivis par les personnes handicapées ? Correspondent-ils aux demandes des entreprises ?
Nous mobilisons en premier les politiques de formation de droit commun : il n'y a pas de raison que les personnes handicapées n'aient que des formations spécifiques. Localement, nous faisons des diagnostics et nous complétons en fonction des besoins : préparation à l'entrée en formation, définition de projet professionnel... .

Une personne handicapée a souvent plusieurs besoins : au départ, il faut dresser un bilan. Qui commence souvent par faire le deuil des capacités antérieures. Exemple : une personne travaillait sur un chantier puis, à la suite d'un accident, il lui faut voir les choses autrement. Tout commence donc par une action de définition de projet. Lorsque les personnes touchées sont peu qualifiées, ce n'est pas simple. Mais n'oublions pas : l'essentiel des handicaps s'acquiert en cours de vie; ils se cumulent avec le vieillissement, il y a donc une forme d'aggravation.


Dans le contexte actuel, l'annonce par l'Etat de la "ponction" de 50 millions d'euros sur le budget de l’Agefiph n'est-elle pas fortement handicapante ?
Ce projet ne touche pas notre action 2008 et 2009 : il n'y a donc rien de nouveau sur ce sujet. Un projet de loi de finances met un certain temps à être débattu. Nous avons eu des rencontres. Le projet est en stand by depuis un mois et demi.
Handicap et Emploi : des chiffres pleins de surprises ... bonnes et mauvaises
1 SUR 3
Une personne handicapée sur trois est sans emploi.

45%
C'est le taux d'activité des personnes handicapées, contre 70% de la population en général

+100%
Le taux de chômage des personnes handicapées est deux fois plus élevé que celui de la population active

51%
des personnes handicapées sont de niveau BEP/CAP

59%
des entreprises jugent difficile l'expérience de l'embauche d'un travailleur handicapé

93%
Pourtant 93% des entreprises qui emploient des personnes handicapées se déclarent satisfaites de leur choix de recrutement.

22%
C'est le nombre de personnes handicapées supplémentaires employées dans les entreprises de plus de 20 salariés entre 2002 et 2007. Sur la seule année 2007, le nombre d'insertions a crû de 11 % (et l'on enregistre déjà une hausse de 13 % pour 2008) et 145.000 personnes ont pu bénéficier d'une formation (+ 20 % par rapport à 2006)

50 Millions d'Euros
C'est le montant de la "ponction" que l'Etat projette d'effectuer sur les recettes de l'AGEFIPH, l'organisme chargé de recueillir les contributions des entreprises à l'insertion des Handicapés.

Soit l'équivalent de "28 000 formations qui ne pourront être délivrées aux personnes à mobilité réduite", d'après Tanguy du Chéné, président de l'Agefiph.

465 Millions d'Euros
C'est le montant des fonds engagés en 2007 par l'Agefiph dans des actions de formation - + 9% en trois ans.


102 Millions d'Euros
C'est le budget 2007 de la FIPHFP, le Fonds d'insertion pour les Personnes Handicapées de la Fonction Publique, dont les missions sont parallèles à celles de l'Agefiph (insertion des handicapés dans le secteur privé)


Sources : Adapt, Agefiph, FIPHFP
 
Les Handichats : dialoguez avec votre futur employeur !
Une première ! Pour la Semaine de l'Emploi qui se déroule du 17 au 21 novembre, des chercheurs d'emploi handicapés pourront chatter en vidéo. Au menu : 32 Chats Emploi avec 32 grandes entreprises qui recrutent et 5 Chats Conseil. Mode d'emploi.

Une opération conjointe : Interneto, Agefiph, France 5.


32 CHATS EMPLOI

Le principe : dès aujourd'hui, les internautes handicapés peuvent s’inscrire sur le site www.handichat.fr et commencer à poser leurs questions. Deux à trois représentants d’entreprise y répondent en direct.

L’ensemble des chats vidéo sera diffusé sur le site www.semaine-emploi-handicap-agefiph.fr et sera également accessible depuis www.handichat.fr. Tous les chats vidéo seront traduits en direct en langue des signes, filmés et retranscrits également en texte.

Les candidats handicapés pourront également adresser leur CV aux entreprises avant, pendant et après le chat. Aussi, pendant et après les chats, les internautes pourront transmettre leur cv aux recruteurs. Un mode de rencontre adapté, car au-delà des difficultés de déplacement, de nombreuses personnes handicapées redoutent de se présenter en direct .

Principaux Recruteurs : BNP Paribas, Caisses d'Epargne, Société Générale, GENERALI (bancassurance), CASINO, CONFORAMA, FNAC (grande distribution), SNCF, EDF, TOTAL, etc...
Dans le secteur "Administrations", on notera la présence de l'UNEDIC.



5 CHATS CONSEIL

Cinq chats conseil animés par des experts seront organisés autour des thèmes suivants :

Handicap et réussite professionnelle : Des personnalités handicapées ayant réussi leur vie professionnelle (dirigeant d’entreprise, artiste, sportif) racontent leur parcours et répondent aux questions des internautes.

Privé, public, quelles aides pour trouver et conserver son emploi ? L’Agefiph et le FIPHFP (1) présentent les aides qu’elles proposent aux personnes handicapées pour accéder et conserver un emploi et répondent aux questions des internautes.

Orientation, ré-orientation, comment ne pas se tromper dans ses choix professionnels ?
Les points de vigilance, les outils et aides disponibles, les secteurs qui recrutent, le choix du milieu ordinaire de travail...

Se former, une piste à suivre pour trouver un emploi
: Pourquoi se former ? Comment se former ? Comment choisir sa formation et son organisme de formation ? Quelles aides, quels conseils pour se former ?

CV, candidature spontanée, réponse à des offres, entretien de recrutement... comment aborder la question du handicap ?

(1) Fonds pour l'Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique

Le Calendrier de ces Rendez-Vous Chats est sur www.handichat.fr

A voir également un site incontournable pour préparer cette Semaine d'Emploi mais aussi pour tout connaître sur tous les aspects du Handicap : Handicap Zéro
Un HandiCafé c'est quoi ?
Un Rendez-vous où handicapés et recruteurs se rencontrent, autour d'un café.

Dans le café sont affichés : les CV d'un côté, les Offres d'emploi de l'autre. Les candidats sont inscrits plusieurs jours à l'avance et reçoivent donc un badge, dès leur arrivée.

Un code couleur permet de différencier les recruteurs des candidats. Facteur essentiel à la réussite de ces rendez-vous conviviaux : la présence de "personnes ressources", qui guident les candidats et facilitent les rencontres.

Cette formule souple, informelle, conviviale, lancée en juin 2007 par l'Adapt, a prouvé son immense efficacité. De Grandes entreprises, comme La Poste ou Areva, se sont saisies du concept - une marque déposée par l'Adapt.

Pour tout savoir sur le Handicafé : Sur le site de l'Adapt . Cliquer aussi sur Jobdating, un autre type de RV Emploi organisés par l'Adapt




Publié dans Emploi

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